En ce temps-là le Château
d’Esthieugues est entouré d’une forêt immense et profonde.
Le seigneur d’Amanzé et sa dame
ont un fils d’une grande beauté. Sa peau est transparente comme un rayon de
lune, ses cheveux noirs et luisants comme l’aile du corbeau, et ses yeux
sombres comme la nuit. Il se nomme Arold.
Un jour qu’il chevauche sur son
cheval blanc, il rencontre une jeune fille belle et resplendissante comme le
soleil avec de longs cheveux d’or et des yeux couleur de ciel d’été. Égarée
dans la forêt, il l’aide à retrouver son chemin et ils tombent fous d’amour
l’un pour l’autre.
Très vite ont lieu les
fiançailles. Florine a quinze ans. Un an plus tard leur mariage offre de somptueuses
réjouissances. Au château la fête bat son plein, elle dure plusieurs jours. Mais
déjà Arold s’en va guerroyer à travers le pays. Il abandonne la belle châtelaine et les jours heureux
derrière lui.
*
Comme le temps paraît long à
Florine sans son aimé et comme elle se désespère ! Un jour d’été plus
triste que jamais, elle décide de rencontrer les fées de la forêt et elle selle
son cheval.
Elle galope longtemps, quand
enfin elle les surprend au bord d’un lac en train de laver leurs bébés !
Honteuses d’être découvertes elles s’enfuient et se cachent.
Seule la plus âgée reste là. Elle
demande :
–Faut-il donc que ta requête soit
urgente pour oser nous déranger ? Ne sais-tu pas que nous sommes très
occupées à baigner nos enfants au solstice d’été ?
–Pardonnez-moi, je
l’ignorais ! Je viens vous implorer de me rendre mon aimé car ma peine est
trop lourde loin de lui.
–Dans ce cas apprends que tu le retrouveras
mais pour bien peu de temps !
Et là-dessus, elle disparaît dans
la brume. On n’entend plus dans la forêt que le long croassement d’un corbeau. Florine
est impatiente pourtant elle s’interroge sans cesse sur ce que la fée a voulu
dire.
*
Un jour de printemps Arold
revient enfin. Il est las de la guerre et ses yeux brillent de retrouver sa
bien-aimée. Ils se jettent dans les bras l’un de l’autre et pour eux commencent
les journées merveilleuses d’un amour infini.
Aussi il décide de préparer de
longues fêtes pour l’anniversaire de Florine. Ces festivités célèbreront leur
bonheur. Pour cela il faut garnir les tables de gibier abondant.
Tous les seigneurs et les
chevaliers alentour sont conviés à se retrouver dans la grande clairière
« la grande cour » (devenue Cours-La-Ville dans le Rhône) avant de
s’échapper au son du cor aux quatre coins des bois.
Les chevaux galopent. Piqués par
leur maître ils se lancent dans une course effrénée précédés par les chiens,
les piqueurs et les veneurs aux cris de :
–Taïau, taïau, taïau !
Le fils du seigneur sur son
cheval fougueux lancé à toute vitesse court sur les traces d’un sanglier dans
la forêt de Mardore (69), redescend vers la rivière, la Trambouze (69).
La force de l’animal, sa
puissance, sa résistance l’entraînent vers le Col de la Bûche (42) et il
parvient à le tuer dans les bois de Rottecorde (42).
Éreinté par sa folle course et
heureux de sa prise, il se laisse choir sur les prés en pente douce de la
clairière de Fontimpe au village Le Cergne (42). Le nez dans les bleuets et les
marguerites, il imagine Florine, sa douce, sa mie, son épousée. Il pense à sa
joie, à son regard limpide, il voit son sourire rayonnant sur ses dents
éclatantes de porcelaine, il compte le nombre des invités à la fête et les
longues et douces soirées d’été sous les tilleuls dans ses bras, un enfant leur
naîtra de ses nuits et… il sourit.
Mais soudain une laie rendue furieuse
par la mort de son mâle surgit farouche, meurtrière. Tel un fauve Arold d’Amanzé
bondit sur ses deux jambes, son poignard à la main.
La bête en furie se déchaîne, se
jette sur lui. L’un et l’autre dévalent le pré dans un corps à corps sans merci
cherchant le point mortel. Arold enfonce le couteau dans le cœur mais déjà la
bête trouve la gorge du chevalier. Elle grommelle une dernière fois
triomphante.
Sous le ciel de Fontimpe le corps
d’Arold git les yeux dans les étoiles.
*
Des heures durant ses compagnons
le recherchent inlassables. Ses traces se perdent, tournent dans la forêt.
Enfin au bas du pré, ils découvrent le jeune homme et la laie étendus l’un près
de l’autre.
Florine éperdue apprend la
nouvelle effroyable. Arold est enterré au château d’Esthieugues mais
inconsolable, chaque matin, elle selle son meilleur cheval. Elle s’en va au
trot sur le lieu où le seigneur d’Esthieugues, le chevalier d’Amanzé a trouvé
la mort et là, elle s’abandonne à son chagrin.
On la croise souvent errante sur
les chemins, livide comme une morte sous ses longs cheveux couleur de blés
murs. Et ainsi chaque jour de ses larmes versées naît une source calme et douce
à fleur de terre sous les pierres.
Elle remplit la fontaine où tant
de fois Florine pleure son aimé. Un jour morne d’automne, elle se hisse sur son
cheval. Elle arrive à Fontimpe et là épuisée elle meurt.
*
On retrouve son corps dans la brume, étendu sur la mousse et
les feuilles éparpillées près de la source. Ses longs cheveux d’or plongés dans
la fontaine projettent un éclat de soleil sur ce lieu et dans ses yeux de ciel
figés par la mort brille une étoile. Souvent à la tombée du soir on peut voir
deux silhouettes se parler, s’enlacer et s’étreindre.
On ne s’étonne pas au pays on sait. C’est Arold et florine
qui se sont retrouvés !
Dans la clairière de Cours et au Cergne, sur la grande forêt
plane toujours l’ombre furtive de leur amour éternel.
Par Dana Lang, conteur-auteur.
Écrit et raconté sur les
lieux mêmes de la légende et de la source, en forêt du Cergne (42), en
1993.
Paru dans le bulletin municipal "Vivre Au Cergne" n°11, en janvier 1994 et édité en novembre
2009 dans le livre de contes : Noëls Enchantés.
A partir d'évènements et faits historiques
remontant au 15ème siècle. Sources : Historique d’Esthieugues
par Jules Bonnefond, Charlieu, rue de la Fromagerie 1895).
il y a de longues années de cela, une jeune poétesse participa au concours de poèmes de Cours-la-Ville et termina 8è sur 60 concurrents. Elle rencontra le président du jury et tomba amoureuse de lui. Il lui sembla qu'elle ne lui était pas indifférente. Quelques mois passèrent, ils s'écrivirent.Et il apprit qu'elle avait fait plus d'études que lui. Sans un mot, il la rejeta de sa vie où elle aurait aimé entrer. Depuis, Cours-la-Ville est synonyme d'ingratitude et cette ville se meurt d'un orgueil mal placé, pour n'avoir pas su accepter l'amour.
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