Suite et fin de l'histoire de Louis Mandrin, bandit bien-aimé.
Dans
cette auberge de son fidèle ami Gauthier, Mandrin prépare avec Bélissard et
Dauphiné (autre chef de contrebandiers) une puissante sixième expédition de 2 000 hommes prévue pour mai 1755. Mais
c’est dans cet asile sûr que le rejoint Marsin, un espion qui va fournir aux
armées royales des renseignements de première main. Marsin fut l’espion qui
approcha du plus près Mandrin bien que Gauthier l’ait très tôt suspecté sans
convaincre son chef, mais il n’est qu’un
des multiples infiltrés par les
Fermiers Généraux au sein des contrebandiers. Mandrin feint alors d’être
diminué et, début mai, va « se mettre au vert » à Rochefort-en-Novalaise.
Les
Fermiers Généraux décident donc de pénétrer illégalement en Savoie, alors dans le duché de Piémont-Sardaigne,
et c’est dans la ferme du château de ce village que, la nuit du 10 au 11 mai 1755, 500 hommes déguisés en paysans arrêtent
Mandrin et ses amis, grâce à la trahison de deux des siens. Ils pillèrent
au passage le château du Premier Président du Parlement du Dauphiné. La
Morlière, Fischer et Diturbide jugèrent prudent d’évacuer sur une charrette
Mandrin et Saint Pierre pieds et poings liés vers Valence où ils arrivent le 13
au matin musique en tête, mais encadrés de dragons. « Belle Humeur »
justifie son surnom, fumant sa pipe et interpellant joyeusement la foule.
Le juge
de Valence, Gaspard Levret de
Malaval, dévoué aux Fermiers Généraux, traite convenablement Mandrin qui
demeure calme et plein d’assurance et dont il reconnaît « qu’il lui en impose » tandis que
des anonymes couvrent la prisonnier de cadeaux (viandes et gâteaux ou boissons
alcoolisées). Néanmoins, comme le roi de Sardaigne Charles-Emmanuel III exige
depuis Turin auprès de Versailles la restitution du prisonnier capturé sur son
territoire, pressé par le Contrôleur général des Finances, menacé d’une
invasion des troupes de contrebandiers massées sur la frontière par Belissard
« Le Pays » parlant de tout mettre à feu et à sang pour délivrer son
chef à Valence, il accélère l’instruction. La peine de mort est prononcée le 24
mai, Mandrin, qui a subi le supplice des brodequins sans parler, est roué vif puis étranglé sans un cri devant
6 000, voire 12 000 curieux venus parfois du fin fond du Vivarais, mais
surveillés par les soldats en armes du régiment de Tallern, le 26 place des Clercs. La capture de
Louis en terre savoyarde entraîna de très vifs échanges entre le
gouvernement de Louis XV à Versailles et
celui du roi de Sardaigne à Turin : ce dernier obtint l’extradition …
quatre jours après l’exécution à Valence ! Fidèle à son pays, il aurait
partagé avec le père Gasparini venu l’assister « un verre de cette délicieuse liqueur que l’on fabrique à La
Côte-Saint-André et pour laquelle je garderai, même dans l’au-delà, une
prédilection » ; fidèle à son engagement, il aurait demandé que
l’on poursuive sa lutte contre le fisc.
Moins de deux ans après
l’exécution de son frère Louis, Claude Mandrin à la tête d’un fort contingent
de contrebandiers vint depuis la Savoie faire une démonstration militaire au Pont-de-Beauvoisin, insultant sur le
pont-frontière les autorités françaises et menaçant de mettre la bourgade à sac !
Le royaume de Piémont-Sardaigne obtint la suppression
des têtes de pont françaises sur la rive gauche du Rhône en 1760. En 2002,
le nom du « héros » local est donné à une bière grenobloise aux noix ! Sa légende a inspiré dès sa mort (mais à qui ?) une complainte
comportant neuf strophes sur l’air d’un opéra de Jean-Philippe Rameau, Hippolyte
et Arcie composé en 1733, mais elle est truffée d’inexactitudes (vêtements
blancs, contrebande non évoquée, place du Marché à Grenoble et non place des
Clercs à Valence où il fut roué et pendu après sa mort aux fourches
patibulaires !) car il existe tout un cycle de Mandrin comme d’ailleurs de
Lesdiguières. Son nom même est devenu commun pour désigner les
contrebandiers sous le terme de « mandrins » et il fut une manière de symbole dans la lutte contre l’Ancien Régime
en particulier lors de la Commune de Paris. Le cinéma lui aussi a
mainte fois mis en scène ce « bandit bien-aimé » sans être toujours
fidèle à l’Histoire.
Par Pierre Coeur.
Pour en savoir plus :
Mandrin, le capitaine
général des contrebandiers de France, éditions Hachette, Paris, 1908, par Frantz
Funck-Brentano
L’aventureuse existence du Capitaine Mandrin, collection « Provinces », éditions Concorde, 1944, par Prosper GIEN
Contrebandiers et gabelous, éditions France-Empire 1999, par André BESSON
Mandrin Louis (1724 – 1755), Thesaurus III de l’Encyclopedia Universalis France S.A., 2008, par Louis TRENARD
Mémento de l’Histoire du Dauphiné, éditions des Traboules, 69530 Brignais, 2012, par Pierre CŒUR
Wikipédia, Louis MANDRIN
L’aventureuse existence du Capitaine Mandrin, collection « Provinces », éditions Concorde, 1944, par Prosper GIEN
Contrebandiers et gabelous, éditions France-Empire 1999, par André BESSON
Mandrin Louis (1724 – 1755), Thesaurus III de l’Encyclopedia Universalis France S.A., 2008, par Louis TRENARD
Mémento de l’Histoire du Dauphiné, éditions des Traboules, 69530 Brignais, 2012, par Pierre CŒUR
Wikipédia, Louis MANDRIN
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