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Comme prévu, les jeunes époux
Volay-Champ se marient en l’église de Thurins le 29 janvier 1743.
Ensuite, François Sélis notaire
de Thurins et désormais capitaine-châtelain de la baronnie de Rochefort écrit :
« fut présent Jean Voley habitant au lieu du Bayard [les Cambarres]
paroisse de Thurin mari et maitre des droits de Marie Champt lequel (…)
volontairement reconnoi et confesse avoir reçu tans cy devans que présentemens
de Antoine Champ aussy habitans au lieu des Marna susditte paroisse de Thurin
son beaufrère ici présens la somme de 99 livres 19 sols d’une part à bon compte
et en diminution de la constitution de dot faite à la dite Champ dans son
contrace de mariage avec le dit [Volay] (…) et d’autre part les habits nuptiaux
garderobe (…) promises à la dite Champ par le sus dit contrace de mariage de
laquelle somme de 99 livres 19 sols ensemble de fidèles aydes , habits
nuptiaus, garderobbes et autres effets le dit Jean Voley (…) s’en contente ,
quitte et promet faire tenir quitte le dit Champ (…) fait et passé en la
paroisse de Saint Martin en Haut maison de monsieur Gaudin avocat le dimanche
28 juillet après midy l’an mil sept cent quarante trois en présence de sieur
Etienne Claron habitans au lieu du Violet paroisse de Thurin. »
De même, François Sélis notaire
de Thurins et capitaine-châtelain de la baronnie de Rochefort ajoute : « fut
présent Jean Voley laboureur habitans au lieu du Bayard [les Cambarres] paroisse
de Thurin mari et maitre des droits de Marie Champ (…) solidairemens reconnoi
et confesse avoir reçu présentemens réellemens ce comptant en bonnes espèces
d’argens ayans cours (…) ce témoins d’Antoine Champ son beaufrère ici présens
ce acceptans la somme de 199 livres 19 sols à bon compte ce en diminution de la
dot constituée par le dit Antoine Champ à la dite Marie Champ sa sœur lors de
son contrace de mariage avec le dit [Volay] (…) fait et passé en la paroisse de
Saint Martin en Haut maison de noble Louis Gaudin avocat au Parlement [du Roi]
le dimanche 25 juillet après midy 1745. »
Or, le 30 août 1745, François
Sélis notaire de Thurins et capitaine-châtelain de la baronnie de Rochefort
retrace une affaire familiale avec un luxe de détails montrant la sociabilité locale
de l’époque : « fut présent Estienne et Pierre Parrel père et fils
communs en biens et tisserands habitans au lieu de la Mure d’Orjolle [Lamure
près du ruisseau d’Orgeole] paroisse de Duerne lesquels solidairement sans
division ni discussion de biens à quoy ils renoncent le dit Pierre Parrel
agissant aussi en qualité de père et légitime administrateur de Jeanne Parrel
sa fille héritière universelle testamentaire de Jeanne Volay femme dudit
Estienne Parrel suivans sa déposition (…) de dernière volonté reçu par maître
[Christophe] Chazottier notaire royal à Saint Martin en Haut en date du 14
novembre 1744 (…) les dits père et fils Parrel (…) reconnaissent et confessent
avoir reçu présentement réellement et comptant en bonnes espèces d’argent ayans
cours (…) à la vue du notaire royal soussigné et des témoins cy après nommés de
Jean Voley vigneron[1] et habitant au lieu du Bayard [les Cambarres]
paroisse de Thurin [héritier] universel de Claude Voley son père ici présens et
acceptans la somme de 125 livres faisant fis, plein et entier acquittement de
la constitution de dot faite à la dite Jeanne Voley tante du dit Jean en faveur
du dit Claude Voley lors du contrat de son mariage avec le dit Estienne Parrel
reçu ainsy qu’il déclare par défuns Maître [Pierre] Meaudre notaire royal à
Rochefort[2] (…)
de laquelle somme de 125 livres pour les susdites causes les dits père et fils
Parrel s’en contentent, quittent et promettent faire tenir quitte le dit Jean
Voley et les siens, lequel Jean Voley au moyen des présentes a par convention
expresse faite entre les dits père et fils Parrel demeure chargés d’acquitter à
leurs héritiers à scavoir d’une part la somme de 25 livres légué à Claude Voley
son père (…) fait et passé en la paroisse d’Yzeron dans le logis (…) la Croix
Blanche le lundy trentième du mois d’aoust
apas[après] midy 1745 en présence de sieur Claude Presle marchand
habitans en la paroisse de Duerne et de Jean Bossu laboureur et habitant au
lieu du Piney paroisse de Thurin. »
Or, le 19 mai 1746, François
Sélis notaire de Thurins et capitaine-châtelain de la baronnie de Rochefort
continue d’écrire à propos de la dot de l’épouse de Jean Volay :
« furent présens Jean Volay vigneron et habitans au lieu du Bayard [les
Cambarres] paroisse de Thurin en lyonnois et conjointemens avec lui et sous son
autorité Marie Champ qu’il autorise (…) reconnaissent et confessent avoir reçu
(…) de Antoine Champ habitans au lieu de Marna susdite paroisse de Thurin (…)
la somme de 99 livres 19 sols (…) en diminution de la constitution de dot faite
à la dite Marie Champ lors du contrace de son mariage avec le dit Champ (…)
fait et passé en la paroisse d’Yzeron maison du sieur Blanc habitans au dit
lieu le dix neuvième may après midy l’an 1746. »
De même, le 17 avril 1747, François
Sélis notaire de Thurins et capitaine-châtelain de la baronnie de Rochefort
écrit : « fut présent Jean Voley vigneron et habitans au lieu du
Bayard [les Cambarres] paroisse de Thurin mari ce maitre des droits de Marie
Champ lequel tans en son nom quen la susdite qualité volontairemen reconnois et
confesse avoir reçu présentemen réellement ce comptans en bonnes espèces
d’argens ayan cours (…) d’Antoine Champ son beaufrère marchand et habitans au
lieu des Marna susdite paroisse de Thurin ici présens et acceptans la somme de
99 livres 19 sols à bon compte et en diminution de la constitution de dot faite
à la dite Marie Champ femme dudis reconnaissans par le contrace de leur mariage
reçu ainsy que les dites parties déclarent par le dit notaire royal soussigné
(…) de laquelle somme de 99 livres 19 sols pour les susdites causes ledit
reconnaissans s’en contente ainsy que des 5 ânées de vin[3] qui
lui furent promises pour le festin des noces qu’il a reçu cy devans en espèce
et du tout en quitte le dit Champ son beaufrère envers et contre tous. »
Malheureusement, Jean Volay
devient veuf mais il se remarie en 1755, à l’âge de 45 ans avec Benoîte Jourdan
de Saint Martin en Haut.
Or, à la suite du décès du père Jean Volay le 9
septembre 1770, les difficultés sociales s’amoncellent à la ferme au lieu-dit
les Cambarres : la mère, Benoite Jourdan, est désormais veuve et, faute
d’argent, ne parvient donc pas à faire « tourner » la maison. C’est
pourquoi, sa fille, Claudine Volay, s’emploie comme servante sur la paroisse de
Rochefort. Les conditions de survie étant exceptionnellement dures, Claudine
est très malade à l’âge de 17 ans ; elle fait donc rédiger, le 25 janvier
1773, son… testament devant le notaire Benoit Chastaing de Saint Martin en Haut
et elle pense à sa pauvre mère : « fut présente Claudine Volay servante
domestique au service de Floris Sallignat habitant demeurant au lieu de Chez
Guinand parroisse de Rochefort laquelle étant indisposée de sa personne dans un
lit étant dans une chambre dépendante du domaine du dit Floris Sallignat
prenant son entrée par une galerie à costé de la cuisine où habite le dit
Sallignat (…) a volontairement (…) prononcée son testament (…) son héritière
universelle (…) savoir Benoite Jourdan sa mère veuve de Jean Volay vivant demeurant
au lieu du Bayard [les Cambarres] parroisse de Thurin, sa ditte mère demeurant
au même lieu et parroisse, à laquelle la testatrice veut tout le dit résidû de
son bien arriver et de plein droit apartenir sitôt le décès de la testatrice
arrivé (…) fait et passé au dit lieu de Chez Guinand dans la chambre sus
désignée dépendante du domaine aussy sus désigné parroisse du dit Rochefort (…)
en présence de messire Augustin Dubeyssey (…) prêtre (…) de la parroisse du dit
Rochefort. » En fait, Claudine ne connait pas bien sa
« maladie » et ignore qu’elle vivra jusqu’à l’âge de 82 ans ! Par
la suite, Claudine semble surtout avoir « la maladie d’amour » du
jeune homme, Jean-Claude Chantre, qui aide aux travaux agricoles chez sa
mère !
Par Christian Fougerouse.
Extrait de Histoire et économie rurale d’un lieu-dit en ruine
à Thurins en lyonnais du XVIIe au XXe siècle, éditions universitaires
européennes.
[1] Enorme surprise en ce
milieu du XVIIIe siècle, Jean Volay cultivait de la vigne au lieu-dit les Cambarres
à plus de 625 mètres d’altitude ! Or au XIXe siècle, les notaires écriront
qu’il n’y a ni cuve, ni pressoir et qu’étant sur la partie haute de la commune
de Thurins, la culture de la vigne n’y serait pas possible…. On notera que
cette ferme s’appauvrît avec l’abandon de la vigne… Comment la culture de la
vigne était-elle imaginable ? Le terroir est exposé au sud sur des pentes
raides autorisant un « micro-climat ». Le rayonnement solaire en
altitude peut être localement plus important que dans les bas-fonds brumeux.
Les sols sont pierreux, très secs et les murets des terrasses absorbent la
chaleur : malgré l’altitude, le raisin devait parvenir à mûrir. Les
vendanges devaient être tardives, avec un fort contraste des températures
diurne et nocturne, pour un vin très très typé mais pas forcément mauvais,
étant donné le faible rendement et la sécheresse estivale. Après tout,
châtaignes et pommes étaient bonnes localement. On l’aura compris, il
s’agissait d’un terroir…d’exception !
[2] Malheureusement, les
archives de ce notaire ont disparu, sans doute avec la Révolution et les
troubles qui s’en suivirent dans la baronnie de Rochefort. De 1731 à 1743, Pierre Meaudre fut aussi
capitaine-châtelain de la baronnie de Rochefort.
[3] Soit 45 litres environ.
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