Ce petit tour de Montchat se termine là où il a commencé, sur
la colline où se trouve le parc de Chambovet. Ce parc fut la propriété de la
famille Tavernier jusqu’en 1968. René Tavernier, philosophe et poète, père du
cinéaste, s’y réfugia pendant la guerre. Il dirigeait la revue Confluences.
Résistant, il organisait des réunions dans cette demeure et y accueillit Elsa
Triolet et Louis Aragon jusqu’en 1943. C’est là que ce dernier écrivit
« il n’y a pas d’amour heureux ».
Photo Jacques Morize |
Racheté par la ville en 1968, ce domaine
devient parc public pour partie et accueille des jardins ouvriers dans sa
partie basse. J’ai lu que ce parc était planté de 300 arbres d’espèces variées,
parfois rares et exotiques. La photo ci-dessous, prise à la fin d’une journée
tristement hivernale, reflète ma perplexité. A part quelques cèdres du Liban,
je n’ai pas vu ces fameux arbres exotiques. Par ce temps gris et humide, le
parc est assez sinistre et j’ai même craint d’y croiser le diable de
Montchat !
Photo Jacques Morize |
Nous y voilà revenus, à ce diable !
Lorsque j’ai fait une signature à la librairie de Montchat, cours du docteur
Long, on m’avait installé dehors, avec une table et une chaise. Du coup,
beaucoup de gens s’arrêtaient même s’ils n’étaient pas intéressés par le
bouquin. Le côté village, toujours.
C’est ainsi que j’ai été
interpellé par une vieille dame très comme il faut, accompagnée de ses deux
petits enfants fringués comme deux bons petits cathos : quelque chose
comme pantalon de velours marron et chandail bleu, blonds et bien peignés.
« Pourquoi un
diable ? » me dit la grand-mère d’un ton mi-suffisant, mi-agressif.
« Moi, j’ai deux petits anges ! ». « Satan n’était-il pas
un ange avant d’être maudit par le Seigneur ? » lui ai-je rétorqué. Fâchée,
elle a tourné les talons, interrompant abruptement cet échange à haute teneur
théologique. Pas de regret, elle n’aurait pas acheté mon sulfureux opus.
Un autre Montchatois m’a abordé ensuite,
m’interrogeant sur ce qui m’avait inspiré. Je lui ai parlé de ce violeur qui
s’introduisait par les fenêtres, de cette histoire que l’on a tenté de mettre
sur le dos de Dominique Baudis, ancien Maire de Toulouse (des parties
« fines » au cours desquelles des prostituées auraient été torturées,
et parfois tuées), des multiples scandales qui ont frappé les tribunaux de
commerce et les syndics de faillite. Lui m’a affirmé qu’un violeur avait sévi à
Montchat, un maçon qui s’introduisait chez ses victimes en escaladant les
échafaudages des immeubles en travaux. J’ai tenté de vérifier, je n’ai rien
trouvé de tel. Toujours est-il que le mystère du diable de Montchat n’en est
pas un : j’ai situé l’origine de mon histoire dans ce quartier tout
simplement parce que m’y étant perdu à plusieurs reprises lorsque je suis
arrivé à Lyon, j’ai été frappé par cet environnement de pavillons niché en
pleine métropole. J’y ai transposé ce violeur qui sévissait en région
parisienne. Et depuis, je retourne à
Montchat et y tourne toujours avec le même plaisir, même, si comme dans toutes
les grandes villes, les immeubles remplacent peu à peu les maisons et les
jardins. C’est la vie de la ville.
Par Jacques Morize.
Et maintenant, promenez-vous dans le polar Le diable de Montchat !
Par Jacques Morize.
Et maintenant, promenez-vous dans le polar Le diable de Montchat !
Le Diable de Montchat, Jacques Morize, éditions Les Grilles d'Or, 2012 |
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