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Les trains partant de cette gare allaient vers l’Est de la
France (d’où de sinistre mémoire les départs et retours - pour ceux qui
revenaient, et dans quel état - des poilus en 1914-18). Mais cette gare desservait
aussi et surtout Genève et les Alpes-Dauphiné et les hôtels aux alentours
étaient des palaces identiques à ceux de la Suisse. La Brasserie des
Brotteaux est un vivant témoignage de la
richesse décorative et de la recherche « art nouveau » d’alors.
Devant la gare passe l’avenue du Général Brosset.
Le Général Diego Brosset (né à Buenos Aires en 1898 et mort
en 1944 d’un accident de jeep dont le chauffeur qui n’était autre que le
comédien Jean-Pierre Aumont réchappa) est le libérateur de Lyon en 1944 à la
tête de la Première Division de la France Libre qu’il commandait en Italie puis
dans le midi de la France. Avant 1945 la rue portait le nom de Jules Ferry, ce
qui faisait double emploi avec la place voisine.
La place Jules Ferry va de la rue Juliette Récamier à la rue
Lalande. Cette vaste place monumentale a été aménagée en même temps que la gare
des Brotteaux à la fin du XIX ème siècle et au début du XXème. Il faut se
souvenir qu’avant cet espace et celui occupé aussi par les bâtiments hâtivement
évoqués plus avant, étaient une pièce d’eau mi-lac naturel, mi-étang ou mare dans
laquelle les enfants du quartier se baignaient et où l’on pouvait voir des
lavandières, aux croupes avantageuses de par leur position pour frotter le
linge, vaquer à leurs tâches ménagères, et des bêtes s’ébrouer et s’abreuver.
On a donné à cette place le nom de Jules Ferry (Saint Dié
1832-Paris 1893) tristement célèbre chez les écoliers pour avoir rendu
obligatoire l’école !
Sur cette place prochainement redessiné par le projet de
parking, on peut admirer deux petits bassins sympathiques avec des alimentations
en eau zoomorphiques (tortues et grenouilles) et une statue très massive de Mr
Barbero, Député du Rhône et élu du quartier faisant office de maire avant guerre
et donc avant la loi PLM de redistribution administrative des grandes
agglomérations urbaines. Cette place accueille la rue Lalande correspondant
pleinement à notre évocation d’un quartier futuriste de par le patronyme qu’on
lui a attribué. En effet il existe toute une famille d’astronomes français du
nom de Lalande. Celui qui est en cause ici est le plus célèbre et le plus local
par sa naissance : Joseph-Jérôme Lalande (Bourg 1732-Paris 1807) directeur
de l’Observatoire de Paris de 1768 à sa mort, auteur d’une « Histoire
Céleste Française » décrivant la position de 50000 étoiles. Il était
convaincu que l’homme réussirait un jour des voyages interplanétaires.
C’est pourquoi,comme nous le signalions au début de notre
évocation, un architecte humoriste a posé sur le toit de l’un de ses immeubles
des auvents de balcon en forme de soucoupe volante. Rappelons également le
central téléphonique Lalande et les numéros d’alors LAL 43 20 ou LAL 12 63…
Le chemin de fer (d’où descendit à deux reprises, venant d’Amiens
dont il était adjoint au maire, le grand Jules Verne venant retrouver entre
autres ses amis circassiens les Rancy pour lesquels il écrivit « César
Cascabel », ou venant finaliser un de ses guides de voyage - ancêtre du
Routard - qu’il signait avec Adolphe Joanne), le chemin de fer
donc, l’aérostat, l’avion (de par l’implantation Bvd Jules Favre d’une usine de
pièces détachées Latécoère et Voisin), le téléphone, les voyages, les soucoupes
volantes, l’installation de plusieurs détaillants de matériel informatique ou de
nouveaux médias, des architectes entreprenants comme entrepreneurs… sans conteste
ce quartier est un peu le Métropolis de Lyon ou le Gothamcity (la partie obscure
oubliée) du sixième arrondissement… et ces allusions ne sont pas
totalement gratuites ou farfelues puisque outre les écrivains lyonnais qui se
réunissaient au café des voyageurs, actuel café de la Gare
(H.Béraud, M.Achard, G.Chevallier, B.Clavel…), on trouvait dans les années soixante
autour du peintre et jazzman Raul Bruckert de jeunes dessinateurs de BD comme
Moebius rejoint plus tard par Tardy entre autres et deux étudiants américains
de passage : Paul Ryan et Sal Buscema le premier dessinateur des
« Quatre fantastiques », le second du célébrissime
« Spiderman », deux BD cultes des Marvel Comics dont l’éditeur pour la
France est l’entreprise lyonnaise Semic…
Par Jacques Bruyas.
Extrait de Flâneries.
Permettra-t-on à mon chauvinisme d'ajouter que le général Diego Brosset était un enfant du Grand Lyon, de Rillieux alors dans l'Ain dont un parc porte toujours le nom de la famille et la rue derrière la mairie celui du libérateur de Lyon ?
RépondreSupprimerMerci de votre rajout, Pierre.
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