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mercredi 27 mars 2013

Camille Claudel dans l'actualité ? - 2

Suite de la lettre - imaginée par J. Bruyas - de Camille Claudel à son frère, à l'occasion du film "Camille Claudel 1915" de Bruno Dumont avec Juliette Binoche.

[...]
Mon Paul, mon petit Paul, je sais que tes pièces  continuent  d’être jouées  à travers le Monde et que justice t’est en quelque sorte rendue chaque soir sur les planches d’un théâtre mais qui oserait dire que tu fus un des premiers intellectuels à interpeller le Maréchal Pétain sur la complicité assassine de son gouvernement à l’égard des juifs de France, que tu fus des rares écrivains à demander l’abolition de la peine de mort, insupportable au seul égard de ta foi, en un pays où la guillotine marchait alors à pleine puissance, à dénoncer les bagnes et travaux forcés, toi, qui aurais alors laissé sa sœur internée en ce maudit hôpital de Mondevergues où ma propre mère et ma sœur m’enfermèrent prétendument pour mon bien.
Souviens toi, mon cher Paul, mon second prénom est Anastasia, ou Anastasie, comme l’Anastasie du Père Goriot de Balzac, honnie par sa sœur Delphine…mais moi  je ne voulais de notre père que son amour, nullement son héritage…
Tu jouais avec mon prénom en ce début de XXème siècle en apprenant la naissance d’une princesse russe aussi prénommée Anastasia et tu m’affublais des diminutifs de cette dernière en m’appelant dans ta tendresse Nastanka ou Nastya… Qu’il est loin ce temps des bonheurs simples.
On va donc m’incarner sur grand écran, me montrant exaltée, possédée, et surtout contrite d’une attente insatisfaite d’un petit frère impuissant à me dégager des griffes d’une procédure tutélaire m’obligeant à un enfermement à vie.
Tu vas encore en entendre des vertes et des pas mûres sur ton compte, sans compter qu’en ces temps de pensée unique tu représentes tout ce que les esprits supérieurs s’appliquent à dénigrer, un grand ambassadeur, un chrétien papiste, un écrivain catholique engagé dans sa foi mais détaché des errements sociaux, un individualiste par la force de tes éloignements diplomatiques et de tes réserves de haut fonctionnaire, un frère aimant, aimé mais incapable de s’opposer à une mère castratrice enfin un mari et père de famille clanique, jouant au hobereau campagnard dans ton Brangues d’adoption…Qu’importe mon petit Paul, saches que moi je t’ai toujours chéri et que si la vie en avait été différente, point mon amour n’en aurait été moins fort.
N’écoute rien à mon sujet, caresse quelqu’une de mes statues et remue dans ton cœur un de ces instants magiques des soirées de Villeneuve-sur-Fère où nos rires conjuguées interpellaient les étoiles et plaisait forcément à Dieu.

Ta Camille

Par Jacques Bruyas, auteur de la pièce Nous ne reviendrons plus vers vous (éditions Cosmogone), inspirée des correspondances échangées entre Camille et Paul Claudel, dont vous pouvez découvrir un extrait en cliquant ici.

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